mercredi, 04 décembre 2024
La Turquie et l'Europe
J'ai relu récemment ce texte, écrit avec un autre militant, lorsque j'étais adhérent des Jeunes UDF de la Somme, en 2006. Si la situation de la Turquie a un peu évolué, en raison des soubresauts politiques, ces quelques lignes restent d'une authentique actualité.
L’argument historique
La Turquie se serait séparée de l’Europe, avec l’islamisation d’une part, qui l’aurait totalement ancré en Orient, et avec le belliqueux Empire Ottoman, d’autre part, qui n’a eu de cesse, jusqu’au début du 20ème siècle, d’attaquer l’Europe par l’est. Ces épisodes ne doivent inspirer aucune nostalgie ; l’histoire, on ne le répétera jamais assez, ne doit pas handicaper la construction du futur. Le passé nazi de l’Allemagne n’empêche pas la construction européenne. Alors le passé ottoman de la Turquie…
L’argument géographique
Seul 3% du territoire turc se trouverait en Europe, le reste se trouvant en Asie. Sur ce petit trentième, tout de même, se trouve Istanbul. La géographie est-elle un argument ? La politique ne dépasse t-elle pas ces contraintes physiques ? Sans quoi il est difficile d’expliquer pourquoi certaines îles antillaises constituent des départements français…
L’argument religieux
Gros défaut de la Turquie, elle n’est pas chrétienne… Si l’on reconnaît un héritage religieux à l’Union européenne, et que personne ne doute qu’il s’agit d’un héritage chrétien, ou judéo-chrétien, cette question ne fait de toute façon pas l’objet d’un critère d’adhésion. Et puis la France n’est pas chrétienne… Elle est laïque, comme la Turquie… Et le risque de l’intégrisme ? Refuser la Turquie est le meilleur moyen de l’attiser…
L’argument démographique
La Turquie, qui n’a pas encore achevé sa transition démographique, devrait stabiliser sa population dans un demi-siècle, aux alentours de 98 millions d’habitants, ce qui en ferait l’Etat le plus peuplé de toute l’Union européenne. Ce qui d’après certains pose un problème institutionnel, puisque la Turquie serait alors le pays le plus représenté au Parlement européen. On ignorait que les groupes politiques du Parlement européen se composaient par nationalité. On image aisément que parmi les futurs eurodéputés turcs, nous retrouverons des sensibilités bien différentes, qui les répartiront entre le groupe socialiste, centriste ou autre du Parlement européen. Espérons qu’un jour l’Europe soit pensée comme un tout, et non comme une somme d’états défendant chacun leurs intérêts propres…
Les arguments politiques
Les arguments politiques sont les plus sérieux des opposants à l’entrée de la Turquie dans l’Union européenne. Car, pour une fois, ils sont recevables. Les droits de l’Homme, au passage celui des femmes, la question kurde, la proximité de l’armée et du pouvoir… Ces questions – touchant aux valeurs mêmes de l’Union européenne – posent évidemment de sérieux problèmes. Sans oublier la reconnaissance du génocide arménien, qu’il faut conserver comme condition sine qua non de l’adhésion. Et la reconnaissance de l’Etat de Chypre. Impossible, en effet, qu’un membre de l’Union européenne ne reconnaisse pas l’existence même d’un autre de ses membres. Au passage, notons que l’Union européenne n’aurait jamais dû accepter l’adhésion de Chypre suite au refus des chypriotes grecs de réunifier l’île… Mais ces questions, si elles empêchent bien évidemment une adhésion immédiate de la Turquie à l’Union européenne (sans parler des critères de convergence économique…), n’enterrent pas la vocation de la Turquie à entrer dans l’Union européenne. La nuance n’est pas mince. Les négociations d’entrée de la Turquie sont légitimes, nécessaires et vont dans le bon sens. La situation au Proche-Orient nous presse chaque jour un peu plus. Ce sur quoi il faut se fixer et agir, c’est sur les avancées politiques et démocratiques de l’Etat turc.
10:54 Écrit par Fabrice Hinschberger dans BFH Europe | Lien permanent | Commentaires (0) | Facebook | | Imprimer | |
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